En considérant une série quelconque, nous avons construit les égalités suivantes :
\begin{align*} a_1 &= \pi+(a_1 -\pi) \\ a_2 &= -(a_1-\pi)+(a_1+a_2 -\pi ) \\ a_3 &=-(a_1+a_2- \pi)+(a_1+a_2+a_3-\pi) \\ a_4 &= -(a_1+a_2+a_3-\pi)+(a_1+a_2+a_3+a_4-\pi) \\ \ldots \end{align*}
En additionnant les équations, nous avons obtenu :
\begin{align*}a_1+a_2+a_3+a_4+a_5+a_6+a_7+ \cdots =& \pi + (a_1-\pi) – (a_1-\pi) \\ &+\,(a_1+a_2- \pi)-(a_1+a_2- \pi) \\ &+\, (a_1+a_2+a_3-\pi)-(a_1+a_2+a_3-\pi) \\ &+\, (a_1+a_2+a_3+a_4-\pi) \cdots\end{align*}
Toutes les parenthèses dans le second membre de cette égalité se simplifient deux à deux et disparaissent et il reste :
\[a_1+a_2+a_3+a_4+a_5+a_6+a_7+ \cdots =\pi\]
C’est absurde : toute série ne peut valoir \(\pi \! \)!
Solution
Les sommes infinies ne peuvent être manipulées sans précautions et il est naïf de croire que tout ce qui est vrai pour les sommes finies s’étend aux sommes infinies. La théorie des séries formule et explique les règles qu’on doit respecter et met en garde contre celles, parfois tentantes, qui conduisent à l’absurde. En particulier, « prendre des égalités et en déduire que la somme des premiers membres est égale à la somme des seconds membres » est une règle vraie lorsque les égalités sont en nombre fini, mais qui, dans le cas d’une infinité d’égalités, est susceptible de produire des catastrophes. C’est ce qui se passe dans notre démonstration.
L’exemple suivant, plus simple que celui du paradoxe qui n’en est qu’une version compliquée, devrait vous convaincre définitivement qu’on ne peut ajouter sans précautions une infinité d’égalités. Partons de l’égalité \(0 = 1-1\) écrite une infinité de fois.
\begin{align*} 0&=1-1 \\ 0&=1-1 \\ 0&=1-1 \\ &\ldots \end{align*}
Additionnons d’une part les premiers membres et d’autre part les seconds membres. Nous obtenons une nouvelle égalité :
\[ 0+0+0+ \cdots = 1-1+1-1+1-1+\cdots \]
Simplifions à gauche et plaçons des parenthèses à droite de la façon suivante :
\[ 0+0+0+ \cdots = 1+(-1+1)+(-1+1)+(-1+1)+\cdots \]
En simplifiant les parenthèses, nous obtenons :
\[ 0+0+0+ \cdots = 1+0+0+0+\cdots = 1 \]
Le détail des règles autorisées et interdites dans les manipulations des sommes infinies est parfaitement connu aujourd’hui et est décrit dans les livres de mathématiques : les professeurs de mathématiques qui vous demandent d’être prudents ne le font pas pour le plaisir de vous ennuyer mais parce que, sans précaution, on prouve que \(0 = 1.\)