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Dossier GPS: Où suis-je ?

Par Christiane Rousseau
Volume 1 - été-automne 2006

Répondre à cette question, c’est retrouver son territoire de chasse ou son campement pour le chasseur des temps préhistoriques. Revenir à bon port pour le navigateur du XVIIe siècle. Un outil moderne pour y répondre, le GPS.

L’utilisation du GPS permet aussi de faire atterrir des avions dans le brouillard, d’aider les aveugles à retrouver leur chemin dans nos villes, de localiser les zones orageuses, comme le fait Hydro-Québec, pour protéger les réseaux de transport d’électricité.

Le GPS (“Global positioning system”)

Le système GPS a été complètement déployé en 1995 par le Ministère américain de la défense qui autorise le public à s’en servir. En utilisant un récepteur GPS, un objet qui est maintenant à la
portée de toutes les bourses et qu’on peut ranger dans sa poche, on peut connaître notre position à 15-20 mètres près. Dans la plupart des techniques de positionnement, on détermine la position par rapport à des objets dont la position est connue : c’est ce qu’on appelle faire de la triangulation.

Ce peut être par rapport au soleil ou aux étoiles (voir section problèmes), des antennes dans le système Loran, des satellites dans le système GPS.

Comment fonctionne le GPS?

Un minimum de 24 satellites (en 2005 on en comptait plus de 32) bougent sur des orbites autour de la Terre à une altitude de 20 000 km et émettent des signaux répétés périodiquement. Ces orbites, au nombre de 6, font un angle de 55 degrés avec le plan de l’équateur. Il y a au moins 4 satellites sur chacune (voir figure 1). La distribution des satellites est telle qu’à tout instant sur la terre on peut capter le signal d’au moins 4 satellites.

Les satellites dans le système GPS sont répartis sur six plans orbitaux inclinés d’environ 55 degrés avec le plan de l’équateur.

Figure 1: Les satellites dans le système GPS sont répartis sur six plans orbitaux inclinés d’environ 55 degrés avec le plan de l’équateur.

Les signaux sont captés à l’aide d’un récepteur. Le récepteur calcule sa position sur la terre. Le principe est que le récepteur mesure les temps de parcours des signaux depuis les satellites jusqu’à lui. Étant donné que chaque signal voyage à la vitesse de la lumière, cela permet de calculer la distance entre le récepteur et chacun des satellites. La donnée de la distance \( d_1 \) entre un satellite \( S_1 \) et le récepteur permet de conclure que le récepteur se trouve sur la sphère de rayon \( d_1 \) centrée au satellite \( S_1 \). Si on connaît la distance \( d_2 \) entre le récepteur et un deuxième satellite \( S_2 \), on sait que le récepteur est aussi sur la sphère de rayon \( d_2 \) centrée en \( S_2 \). L’intersection de ces deux sphères est un cercle \( C \) (figure 2).

Deux sphères s’intersectent en un cercle C. L’intersection avec une troisième sphère donne deux points.

Figure 2 : Deux sphères s’intersectent en un cercle C. L’intersection avec une troisième sphère donne deux points.

Enfin, si on connaît la distance \( d_3 \) entre le récepteur et un troisième satellite \( S_3 \), alors on sait que le récepteur est sur la sphère de rayon \( d_3 \) centrée en \( S_3 \). L’intersection de cette sphère avec le cercle \( C \) consiste en deux points. L’un de ces deux points se trouve toujours loin de la surface de la Terre (un avion est au maximum à 12 kilomètres d’altitude, ce qui est considéré proche) et est éliminé parce qu’irréaliste. Donc, en mesurant les temps de parcours de trois signaux depuis 3 satellites jusqu’à lui le récepteur peut calculer sa position (i.e. longitude, latitude et altitude).

En pratique les choses sont un peu plus compliquées, car les temps mesurés sont très petits et il faut donc faire des mesures très précises. Les satellites sont équipés d’horloges atomiques très coûteuses et parfaitement synchronisées alors que le récepteur a une horloge de qualité moindre. En plus des 3 inconnues qui sont les coordonnées de la position du récepteur, il y a donc une 4e inconnue : le décalage entre l’horloge du récepteur et les horloges des satellites (lequel est le même avec tous les satellites). Le récepteur a alors besoin d’une 4e mesure du temps de parcours du signal entre un 4e satellite et le récepteur. Il obtient alors un système de 4 équations à 4 inconnues qui sont les trois coordonnées \(x\), \(y\), \(z\) donnant la position du récepteur et le décalage \(T\) entre l’horloge du récepteur et celle des satellites :

GPSformula

Ce système admet encore deux solutions dont l’une est de nouveau éliminée parce que non réaliste. C’est le récepteur qui est chargé de résoudre ce système. Comme la solution inclut le décalage \(T\) entre l’horloge du récepteur et celle des satellites, le récepteur peut alors ajuster son horloge sur celle des satellites.

À la théorie élémentaire s’ajoute beaucoup de sophistication

  1. Les vitesses des satellites sont suffisamment importantes pour qu’il faille apporter des corrections aux calculs pour prendre en compte les théories de la relativité spéciale et de la relativité générale.
  2. Le signal est une onde électro-magnétique qui se propage à la vitesse de la lumière. Un GPS commun utilise la vitesse de la lumière dans le vide pour faire le calcul. Mais le signal d’un satellite voyage au moins partiellement dans l’atmosphère. Sa vitesse moyenne dépend des conditions atmosphériques et de la hauteur du satellite au-dessus de l’horizon. Lorsqu’une très grande
    précision est nécessaire on recourt à des GPS différentiels : on compare le temps de parcours du signal du satellite au récepteur à celui du temps de parcours du même satellite à un deuxième récepteur GPS situé dans la même région et dont la position est connue. Ceci permet de mesurer la vitesse de la lumière à utiliser dans les calculs de position.
  3. Pour pouvoir facilement mesurer le temps de parcours du signal on a recours à des signaux spéciaux.

Hydro et GPS

Hydro-Québec utilise ce principe d’ajustement des horloges des récepteurs GPS pour synchroniser tous ses équipements. Partout les équipements d’Hydro-Québec sont couplés avec des GPS dont les horloges sont synchronisées sur celles des satellites : les horloges de ces GPS sont donc toutes synchronisées entre elles.

Ces horloges synchronisées permettent diverses opérations de triangulation : localisation des zones orageuses, localisation de bris sur une ligne de transport, etc.

Pour la localisation des zones orageuses Hydro-Québec dispose de 13 stations dispersées sur son territoire qui enregistrent les coups de foudre. Ces stations sont situées loin des lignes de transport pour éviter les interférences. Deux stations notent le moment où elles enregistrent le coup de foudre. En calculant l’intervalle de temps entre ces deux moments, cela leur permet de localiser la position du coup de foudre sur une branche d’hyperbole. Si d’autres stations ont enregistré le même coup de foudre on peut localiser le coup de foudre à l’intersection de plusieurs branches d’hyperboles, et donc déterminer sa position précise. Lorsqu’Hydro-Québec a localisé une zone orageuse, elle déleste les lignes de transport passant dans cette zone. Ainsi, en cas de bris de la ligne, le réseau sera moins perturbé et sa fiabilité accrue.

Mais comment deux stations déterminent-elles qu’elles ont enregistré le même coup de foudre ? Il faut pour cela faire de l’analyse de signal. C’est un autre beau chapitre des mathématiques.

Remerciements : l’auteure tient à remercier Jean-Claude Rizzi et Martin Vachon pour lui avoir expliqué les opérations de suivi des orages à Hydro-Québec.

Le GPS en action

Les applications du GPS sont de plus en plus nombreuses. En voici quelques-unes :

  • Photo : Serge Robert

    Photo : Serge Robert

    Retrouver son chemin dans la nature.

  • Tracer un parcours sur une carte : par exemple on parcourt un trajet avec le GPS ouvert. Au retour, en branchant notre GPS sur un ordinateur, on peut faire ajouter le trajet parcouru sur une carte déjà tracée.
  • Photo : Noémie Ross

    Photo : Noémie Ross

    Piloter un avion dans des conditions de visibilité réduite (ou nulle) ou même atterrir dans le brouillard. Le pilote n’a souvent aucun point de repère à part les indications de ses instruments.

  • Aider les non-voyants à retrouver leur chemin.
  • Gérer une flotte de véhicules.
  • Beaucoup de taxis européens sont munis de GPS et de logiciels contenant les cartes et adresses de la plupart des villes européennes : le chauffeur de taxi entre l’adresse (numéro civique, rue, ville, pays) dans le logiciel. Ensuite la position du taxi apparaît en tout temps sur un écran et le logiciel donne des instructions pour emprunter le chemin optimal.
  • L'Everest et le Lhoste. Photo : Olivier Raymond

    L’Everest et le Lhoste. Photo : Olivier Raymond

    Mesurer la hauteur de l’Everest : c’est avec un GPS qu’on a déterminé la hauteur « officielle » de l’Everest pour la communauté scientifique, et tranché le dilemme de savoir si le « sommet du monde » était l’Everest ou le K2. Le débat est définitivement clos depuis 1998 lorsqu’une expédition commanditée par le Musée des Sciences de Boston et la National Geographic Society a utilisé le système GPS pour mesurer exactement la hauteur de l’Everest : il s’élève à 8830 mètres. Le calcul effectué en 1954 par B. L. Gulatee du Survey of India avait conclu à une hauteur de 8848 mètres et on peut s’émerveiller de sa précision quand on sait que les mesures avaient été effectuées à l’époque à partir de 6 stations dans la plaine indienne en utilisant un théodolite (appareil utilisé en géodésie, muni d’une lunette et servant à mesurer les angles). Elles pouvaient être affectées par la réfraction atmosphérique, d’où l’avantage d’une mesure effectuée à l’aide du système GPS. La même méthode a permis de conclure que le K2 culmine à 8611 mètres et donc que l’Everest est bien le Toit du Monde. Le système GPS permet également de mesurer la croissance de l’Everest. En effet ce dernier continue à croître au fur et à mesure que son glacier, le Khumbu, descend.

Nous avons vu comment un récepteur GPS nous donne notre position sur la Terre. Ceci ne nous rend pas service si nous sommes perdus dans la nature, sauf si nous pouvons situer cette position par rapport à des lieux connus, par exemple en nous situant sur une carte. Pour qu’un GPS soit pleinement utile il faut donc que nous disposions de cartes. La Terre étant une sphère et la carte un plan, pour faire de la bonne cartographie on utilise aussi des mathématiques. Nous aborderons ceci dans un prochain article.

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Tags: Applications des mathématiquesGPS

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